À l’occasion de la sortie du gilet / top Dolce Seta en collaboration avec Lanae Tricot et Camelir, j’avais envie de prendre le temps de vous parler de cette matière si particulière qu’est la bourrette de soie.
Comme à chacune de nos collaborations, nous avons voulu vous faire découvrir un fil que nous aimons beaucoup compatible avec les beaux jours. C’était déjà le cas avec le lin et notre pull Kao Lin ou même le chanvre et notre sac Cañamo. Cette fois-ci, c’est la soie que nous mettons à l’honneur et sous la forme si particulière de la bourrette. Je vous invite à mieux la connaitre !
La Soft Silk de BC Garn, un choix évident
Avant toute chose, je vous précise que le fil que nous avons utilisé est le fil Soft Silk de BC Garn, 100% bourrette de soie.
Ce fil, je l’ai d’abord découvert sur le stand de Lanae lors du Knit Eat 2019 à Lyon. Elle avait tricoté un petit top très sympa. J’ai autant été attirée par les couleurs vibrantes de ce fil que son toucher doux mais non glissant. Tricoté, il a des aspérités irrégulières qui donnent une impression de rustique, de naturel que j’aime beaucoup. Cela tout en restant tout confort contre la peau, c’est véritablement le combo gagnant.
Ce n’est pas la première fois que je travaille avec les fils BC Garn, vous le savez. Le fait est que chaque collaboration, au-delà d’un projet motivant qui nous réunit, c’est avant tout une histoire de personnes qui savent et apprécient travailler ensemble. Mes contacts avec BC Garn passent par Caroline de Fibres Collection, la représentante France de la marque. Avec elle, je partage le goût du travail bien fait et le plaisir de donner vie à de nouvelles idées ! Comme Ana était intéressée aussi par la Soft Silk, il n’a pas été trop dur de choisir ce fil. Nous étions toutes sur la même longueur d’ondes !
De la soie en été ?
Je ne sais pas vous mais pour ma part, il y a quelques années, je n’aurais pas spécialement pensé à porter de la soie en été. À vrai dire, je ne me serais pas vue porter du 100% soie tout court. Merci au tricot de nous faire découvrir les matières et leurs bienfaits ! Dans mon imaginaire, la soie est quelque chose qui peut tenir trop chaud. Je m’y connaissais bien mal car en réalité, la soie est un bon isolant : elle est chaude en hiver et froide en été. De plus, c’est une des matières les plus confortables, les peaux sensibles vous le confirmeront.
Même si pour ma part, j’ai choisi un coloris naturel, la soie a aussi ceci de particulier qu’elle absorbe très bien les colorants. On peut donc retrouver une gamme de couleurs très vitaminées et saturées ce qui est plutôt chouette pour la belle saison.
Pour les autres propriétés de la soie, il y a bien sûr la résistance du fil (on portera son vêtement encore et encore…). Là où nous pouvons être surpris, c’est que la soie est normalement brillante. Avec la bourrette, ce côté brillant n’est plus et ce n’est pas pour me déplaire. Le “tissu”, une fois tricoté, reste fluide et doux mais il est matifié et légèrement irrégulier.
Soie → Schappe → Bourrette
Maintenant, je vais revenir avec plus de précision sur ce qu’est la bourrette. Car en effet, si son aspect final est différent d’une belle soie bien lisse et brillante, c’est bien pour une raison. Peut-être que quelque chose vous mettra la puce à l’oreille, c’est le fait qu’un écheveau de 100gr de pure soie et un écheveau 100% bourrette de soie n’auront pas du tout le même prix. Derrière cela se cache un processus de transformation optimale qui ne date pas d’hier…
La soie
Cette matière si précieuse et convoitée est une fibre animale car elle est fabriquée par des petites chenilles (ver à soie) et en particulier le bombyx mori nourri aux feuilles de mûrier sauvage. On récupère le fil de ses cocons. Pour faire court, la soie c’est de la bave de chenille.
C’est en Chine que l’on a exploité ce petit insecte pour la première fois et ce depuis environ 2500 ans av JC. Le pays a longtemps eu le monopole de sa fabrication. Toutes les nations l’ont convoitée. La Route de la Soie tire son nom bien sûr de cette matière car elle était la plus chère qui transitait par cette voie commerciale de grande importance.
Aujourd’hui, à force d’espionnage, l’empire du milieu ne détient plus tous les secrets de la fabrication de la soie. La sériciculture, comme on appelle l’élevage du ver à soie, s’est implantée en France au XVIème siècle de notre ère (et à bien d’autres endroits bien avant), donnant lieu notamment à une industrie de la soie florissante à Lyon avec ses tissages et dentelles.
Comment récupère-t-on le fil de soie ?
Une fois les cocons ramassés, voici ce qui leur arrive :
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- la chrysalide est étouffé avant qu’elle ne perce le cocon pour sortir, l’idée étant de garder le fil intact
- les cocons sont ensuite ramollis dans l’eau bouillante
- ils sont brossés pour dégager l’extrémité du fil
- Une fois le fil déroulé on va le filer avec d’autres fils de cocon pour lui donner de l’épaisseur
- on lave ensuite les écheveaux obtenus, ils deviennent beau et brillant
Tout un processus qui, en plus de l’élevage, explique le coût de la soie.
La Schappe
Comme toute production, celle de la soie a son lot de “déchets”. Si on exploite comme matière première les cocons, lorsque ceux-ci sont ramassés, ils sont en fait accrochés par d’autres fils que l’on ne garde pas pour la soie la plus noble. Il y a aussi des déchets que l’on récupère de l’exploitation des cocons mêmes : fils de longueurs variables, agglutinés les uns aux autres… Plutôt que de jeter ces restes, une deuxième vie leur est offerte. Cette matière si complexe et délicate à produire est donc exploitée à fond.
C’est en Italie, important pays séricicole, que l’on trouve la première utilisation des déchets de la soie en industrie textile (autour du XIème et XIIème siècle). Les restes de soie sont transformés :
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- on les peigne pour les démêler,
- ils sont parallélisés
- et filés pour en faire un fil continu.
Ce fil n’est pas la soie la plus noble, elle se nomme la schappe. Bien qu’elle soit à l’origine considéré comme un “déchet”, il n’en reste pas moins très qualitatif. En effet, il a les propriétés de la soie. C’est surtout son aspect qui varie. Les pays travaillant le plus la soie exportent d’ailleurs ces “déchets” au même titre qu’ils exportent la soie comme matière première. Elle reste donc une matière très prisée.
La soie
Comme il y a tout un processus de transformation pour obtenir de la schappe, vous l’imaginez bien… il y a encore des déchets. Ces déchets sont appelés la bourre. Et nous y voilà ! La bourrette de soie est issue de la schappe qui est issue de la soie.
“Le tissu obtenu avec la bourrette (…) a un aspect et un toucher très particuliers, dus aux variétés de calibre et de longueur des fils avec lesquels il est constitué. Le tissu de bourrette a quelque ressemblance avec la toile de lin; en dépit de son origine, il est d’une extrême solidité, car les fils ont été très tordus, et ils sont généralement plus épais que les fils de schappe ou de soie. La torsion est importante en raison même du caractère discontinu des fils, afin de donner au fil définitif les garanties indispensables de solidité.” – L’industrie de la schappe, F. Aulagnier, 1947
Lorsque l’on parle de ressemblance avec la toile de lin, on parle seulement de son aspect visuel. Au toucher, je décrirais personnellement cela comme quelque-chose de huileux (bien que non gras je vous rassure). Quelque chose de doux et d’agréable sur la peau.
Comme on est sur du sous-produit de sous-produit, on obtient un fil non lisse avec des grosseurs différentes dans un écheveau. Ana, dans sa présentation du modèle sur Youtube parle bien de cette variation d’un point de vue tricot :
Je vous invite bien sûr à regarder toute la vidéo et à vous abonner à la chaîne de Lanae ! Vous ne le regretterez pas.
Pour finir
Parfois critiquée, l’industrie textile porte quand même quelques bons procédés et le démontre notamment avec l’exploitation de la soie. On peut se douter que la logique économique était mise en œuvre dans la production de la schappe et de la bourrette. Cependant, cette exploitation optimale réduisant le nombre de déchets prouve qu’économie se conjugue très bien avec écologie. Il va de soi que la question pourra être creusée mais je n’ai pas pu m’empêcher de penser que la bourrette était upcycling compatible !
Grâce à tous ces procédés, nous avons accès à une matière particulière. Elle est à la fois agréable à tricoter et à porter, sans pour autant nous ruiner ou se vouloir d’un aspect parfaitement lisse.
J’apprécie beaucoup les lectures que le tricot m’amène à avoir et à partager avec vous. C’est aussi un plaisir de connaître un peu mieux les origines des matières que l’on travaille. Cela leur donne de l’importance.
À l’heure où j’écris ces mots, je n’oublie pas que nous sommes encore en confinement dû au covid-19. Pour adoucir ces moments, rien de tel que la soie pour mener la Dolce Vita… D’où le nom Dolce Seta (douce soie en italien, les précurseurs en matière de schappe !).
Doux tricot à vous !
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